Miroirs
pour mezzo-soprano et ensemble
En évoquant sa pièce "Miroirs", Bettina Skrzypczak se refère à une ancienne histoire chinoise racontée par Jorge Luis Borges: Chuang Chong rêvait qu'il était un papillon et ne savait pas en se réveillant s'il était une personne qui avait rêvé d'être un papillon ou s'il était un papillon qui avait rêvé d'être une personne. De la même manière, les mondes réel et imaginaire se mélangent dans "Miroirs". Une réalité cachée se reflète dans le son et dans les paroles, ce qui, dans les situations fugitives comme un rêve - ou peut-être dans une écoute intensive? -, se laisse dévoiler.
Les textes illustrent cette thématique de perspectives complètement différentes. El Bacedor (Borges) est inspiré d'un passage de l'histoire de Mythos; les fragments de Li Taibo évoquent le clin d'oeil extatique qui transcende; dans le quatrain lyrique de Ventadorn, les yeux d'une autre personne sont le miroir du Moi, et finalement dans le texte de Sarmast - un cas intéressant d'auteur masculin avec un regard féminin - la réflexion sur le Moi conduit à la réflexion sur l'infini.
Le propos musical de ce cycle vocal va d'une immersion lyrique jusqu'au son captivant et dramatique; les huit instruments maintiennent un spectre riche en couleur et en tension. La partie chantée est étroitement unie à la partie instrumentale, mais laisse en même temps beaucoup d'espace à la musique pour exprimer le non-dit.
Max Nyffeler